Si le hasard t'emmène jusqu'ici, ne fuis point
Surfe et erre sans fin sur le blog du baladin
Smurfe dégingande-toi au sein du bal à daims
Avec imagination, Sans invitation
Ta religion est l'insubordination ?
Alors gausse-toi ici nul n'est bouffon
ni branque ni saltimbanque honnie soit sale ta banque
Juste des pions décidés à enfin décider
dans un bal laid où déambulent des daims
Manifestant leur insoumission avec dédain
LeonnicAsurgi@yahoo.fr


L’extension du domaine de l’allure : lits et ratures

Au tour de la littérature, maintenant ! Ça aurait pu s’appeler l’Académie des neuf, mais on ne fait pas du neuf avec du vieux, et ils ne seront pas neuf, ce sera l’académie Balzac. Vingt auteurs autour d’une piscine, vains vautours auteurs, châtelains qui plus est car c’est bien connu, les grands écrivains sont issus de la bourgeoisie, comme la Comtesse de Ségur, nul homme ou femme de lettres n’a connu les affres de la pauvreté puisque c’est dans le confort que l’on crée, c’est notoire, ça coule de source d’où l’eau et la piscine, désormais il faudra savoir nager pour écrire quand les anciens ne savaient qu’écrire, il faudra mettre de la crème solaire en sirotant un cocktail à l’ombre quand les anciens s’autodétruisaient ; il faut bien vivre avec son temps. Le lauréat de la téléréalité littéraire qui s’annonce sera celui qui n’aura pas été éliminé entretemps, en fonction de critères assez fumeux, peut-être celui qui aura touché le fond, de la piscine, il faudra savoir parler, se montrer, ajuster sa communication, se vendre, tout ce que Sagan n'avait pas ; la littérature n’est pas un art vivant, ce n’est pas une raison pour souhaiter sa mort.

Il faut bien admettre qu’on n’a plus le temps pour rien et qu’on est devenus omniscients, alors pourquoi lire autre chose que des posts de réseaux sociaux, après tout ? Les classiques sont barbants, les classiques n’ont rien à voir avec le classicisme, époque révolue, les classiques ne sont au final que des œuvres contemporaines qui ont eu le temps de vieillir, à coup sûr dans cent ans on qualifiera de classiques les meilleurs posts de réseaux sociaux.

Une bibliothèque personnelle n’est plus qu’un signe extérieur d’intellectualisme, un meuble qu’on exhibe chez soi comme on exhibait sa télé dans les années 70, tout le monde a une télé, les livres se lisent en tranches, sur la tranche sur laquelle on lit le titre et le nom de l’auteur, comme ces tranches de vies téléréalistes, le Goncourt n’a jamais été autant acheté et aussi peu lu, c’est désormais l’image de l’auteur qui compte, peu importe le contenu de ses livres, tant qu’il reste lisse ou qu’il s’insurge contre un ennemi commun ou une cause adverse, la bankabilité gagne le monde de la littérature et il serait stupéfiant qu’un auteur émerge de ce concours autant qu’il émargera, rien d’autre ne sortira de cette épreuve clownesque que les bizarreries habituelles sous les yeux d’un public complaisant qui s’appauvrit sous les feux de projecteurs et producteurs s’enrichissant sur le dos de candides acteurs lowcost, marge maximale, sur le dos de ces illustres inconnus en mal de vitamine D et à qui on offre une lumière trop vive, ils en sortiront atteints du cancer de la surexposition. Voilà la vocation des téléréalités, ne sont pas philanthropiques, n'ont révélé aucun grand talent jusqu’ici, à part Olivia Ruiz, qui d’ailleurs avait été éliminée avant la fin et a su cracher dans la soupe après coup, ce qui est tout à son honneur.

Beaucoup de questions fondamentales se posent avant l'académie Balzac.
Devrait-on parler de téléfiction si l’on considère que cette téléréalité littéraire s’apprête à couronner un auteur de fiction ?
Les bombes seront-elles tolérées dans cette piscine où on ne saurait faire trop de vagues ?
Faudra-t-il porter un bonnet de bains ? Et si le lauréat attrapait des poux ? Imaginez qu’il passe un coup de fil pour demander un shampoing parapoux, Allô… Peut-on d'ailleurs être un grand auteur et avoir des poux ?
Peut-on parler d'inspiration quand un auteur gonflera ses poumons d’air avant de plonger ?
Les organisateurs savent-ils qu’il arrive à chaque auteur d’être noyé au milieu d’un océan d’idées avant de reprendre pied ? Par conséquent, quelle sera la profondeur du bassin ?
Faudra-t-il savoir mener sa barque ou mener une vie de château ? Savoir mener sa vie plutôt ? Les candidats sauront-ils ne pas bâtir de châteaux de carte ou en Espagne ?
Les candida seront-ils traités avec l’eau du bain ?

Plouf.

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